La transformation de greniers en logements au sein d'une copropriété

Tous les mois, nous vous proposons de décortiquez une nouvelle aventure immobilière d'Antoine, notre personnage fictif, à l'occasion d'un échange avec Eric et Sébastien, cofondateurs d'UrbanSolutions et de la newsletter (Un)Mute

MONTAGE D'OPÉRATIONS IMMOBILIÈRES

3/6/20238 min read

Mardi 28 février 2023, 12h20, Halles Paul Bocuse, à Lyon…

Nous retrouvons Antoine, Eric et Sébastien chez Baba la Grenouille.

Antoine, qui n’a pour le moment pas eu de retour de Maître Larieux concernant son offre d’acquisition, a été informé par un ami, syndic de copropriété, du projet d’une copropriété de céder neuf greniers.

Antoine est ravi à l'idée de cette opportunité qui pourrait se réaliser dans un délai beaucoup plus court que la précédente, mais il se pose un certain nombre de questions.

Fort des récents échanges que nous avons eus avec lui, il nous a proposé d’évoquer ce sujet autour d’un plat de grenouilles sauvages à la persillade et quelques verres de Meursault.

Lors de ce déjeuner, Antoine expose son cas et demande conseil à Eric et Sébastien sur la manière dont ils aborderaient le sujet.

[UnMute] : Cet endroit est vraiment sympa. Sébastien étant basé à Lille, il ne connaissait pas et nous nous étions dit que nous viendrions y manger à l’occasion.

[Antoine] : Ces halles sont emblématiques de l’excellence gastronomique. J’aime ce lieu, il s’y dégage quelque chose de particulier. Un marché couvert unique où bat le cœur gourmand d’une ville qui a fait du bon, du bien et du beau le terreau de sa culture, de son histoire et de son avenir.

Vous qui aimez l’immobilier, vous ne savez peut-être pas que tout a commencé en 1859 lorsque Lyon a créé son premier marché couvert alors que jusque-là les étales étaient en plein air.

[UnMute] : On reconnait bien là ta formation d’architecte. C’est assez smart 😉

Alors qu’Éric et Sébastien parcourent la carte, Antoine commence à expliquer le nouveau projet qui occupe son esprit.

[Antoine] : Vous allez peut-être penser que je passe du coq à l’âne (ou en l’occurrence à la grenouille) mais j’ai été contacté par un copain syndic de copropriété pour me faire part du projet d’une copro de vendre 9 lots qui sont actuellement utilisés comme grenier.

Comme l’emplacement de l’immeuble est prime et que le prix de l’immobilier sur Lyon est assez élevé, je me dis que ça pourrait être une bonne idée d’y réaliser un projet et de faire deux appartements de standing.

[UnMute] : Au contraire, on trouve ça extrêmement intéressant de pouvoir t’accompagner sur une opération d’aménagement et sur ce type d’opération. Il n’y a pas de petite opération. Chacune à sa particularité et potentiellement ses risques spécifiques.

N’hésite pas à te rapprocher d’Antoine que nous avons interviewé dans le premier numéro de la newsletter (ici) car il est particulièrement positionné sur ce créneau des opérations de standing.

[UnMute] : As-tu vérifié qui est propriétaire de ces greniers ?

[Antoine] :Les greniers sont dans l’immeuble et mon copain me dit que la copropriété souhaite les vendre... Je t’avoue que je ne comprends pas ta question.

[UnMute] : Loin de nous l’idée de créer des problèmes là où il n’y en a pas.

Mais tu sais que les organisations en copropriété sont composées de parties dites privatives, grossièrement les appartements de chacun des copropriétaires et leurs stationnements, et de parties dites communes appartenant à la copropriété (circulation, équipements communs, …).

Concrètement, cela signifie que ces greniers peuvent être :

  • soit, constitutifs de lots privatifs, auxquels cas ceux-ci te seront vendus par les copropriétaires qui en détiennent la propriété ;

  • soit, constitutifs de parties communes, auquel cas ils te seront cédés par le syndicat des copropriétaires.

Pour en être sûr, nous te conseillons de vérifier le règlement de copropriété (on parlera de RCP) afin de savoir à qui appartiennent les combles. Dans tous les cas, ton ami devrait pouvoir aisément t’apporter la réponse.

[Antoine] : Effectivement, c’est bien vu. Ce serait bête que j’aille faire la cour pendant des semaines auprès de l’ensemble des copropriétaires pour finalement me rendre compte qu’il s’agit de lots privatifs et que seuls certains d’entre eux en sont propriétaires.

[Antoine] : Vous me conseillez d’aborder le dossier par quel bout ?

[UnMute] : Nous pensons que la meilleure façon consiste à répondre aux questions des différentes thématiques suivantes :

1) Le propriétaire :

  • Qui est-il ?

  • Est-il d’accord pour vendre ?

  • Quelles formalités lui sont éventuellement nécessaires pour formaliser cet accord ?

    • En principe, un copropriétaire pourra te vendre un lot de copropriété sans formalité préalable. Nous te conseillons toutefois de procéder à une analyse du règlement de copropriété car certains d’entre-deux comprennent des clauses interdisant la vente des locaux accessoires (caves, greniers, chambres de service, emplacement de stationnement) indépendamment des locaux dont ils dépendent ;

    • En revanche, s’il s’agit de parties communes, le syndicat des copropriétaires aura besoin d’un vote en assemblée générale qui devra rassembler la majorité des membres du syndicat représentant au moins les 2/3 des voix des copropriétaires (article 26), à condition toutefois que la conservation de ces parties ne soit pas nécessaire au respect de la destination de l'immeuble ou qu'aucune atteinte ne soit portée aux modalités de jouissance des parties privatives. A défaut, l’unanimité sera requise. De plus, nous attirons ton attention sur le fait qu’il arrive parfois qu’un règlement de copropriété impose l’unanimité en cas de changement de destination.

  • Quelle est son histoire ? La problématique que tu règles en achetant ? Pourquoi veut-il vendre le bien ? Est-il pressé ? Si oui, pourquoi ? On dit souvent que les situations de séparation, mutation, crédit-relais chez le vendeur sont des opportunités pour l’acheteur. La même logique s’applique dans la promotion immobilière. Tu dois savoir, pour utiliser ces informations à ton profit, si la copropriété veut vendre les greniers car ils sont régulièrement squattés, parce qu’ils se dégradent, parce qu’elle a un besoin de trésorerie immédiat, etc.

2) L’usage des biens au sein du RCP

Cette question concerne le cas dans lequel les combles sont constitutives de lots privatifs : Indépendamment de la définition de l’usage d’un lot au sein du RCP, le changement d’usage des parties privatives de ce lot peut être réalisé librement par un copropriétaire dans la mesure où ce changement est compatible avec la destination de l’immeuble et ne porte pas atteinte aux droits des autres copropriétaires. Dans ce cas, l’autorisation préalable de l’assemblée générale n’est pas nécessaire.

3) La destination du bien :

Quelle est la destination du bien ? Dans ton cas cela ne devrait pas poser de grosses difficultés puisque tu nous dis vouloir acheter les greniers d’un immeuble de logements.

  • Seule la destination et la surface déclarée dans les dernières autorisations d'urbanisme obtenues par le propriétaire de l’immeuble existant font foi. Il est donc indispensable d’obtenir ces informations et de récupérer la dernière autorisation d’urbanisme concernant l’immeuble existant. Hélas, bien souvent, sur de vieux immeubles, cela ne sera pas possible.

  • Ton projet devra être conforme avec les règles définies par le PLU. A ce titre, il est possible que le PLU t’impose de justifier de 1, 2 ou 3 places de stationnements pour réaliser ton projet.

  • En principe, aucune autorisation d’urbanisme n’est nécessaire car les travaux projetés n’entrainent pas un changement de destination au sens de l’article R.151-27 du code de l’urbanisme. En revanche, une déclaration préalable, voire un permis de construire pourra être nécessaire :

    • En cas de création de surface de plancher : une déclaration préalable sera ainsi nécessaire pour les travaux qui auraient pour effet de créer entre 5 et 20 m² de SDP ou d’emprise au sol (étant précisé que le seuil de 20 m² est porté à 40 m² si la construction est située dans une zone urbaine d'une commune couverte par un plan local d'urbanisme (PLU) ou un document assimilé). Au-delà un PC sera nécessaire ;

    • En cas de modification de l’aspect extérieur de l’immeuble (ex : création d’une fenêtre ou d’une lucarne), une déclaration préalable sera nécessaire.

Pour mémoire, la surface de plancher correspond à la somme des surfaces de tous les niveaux construits, clos et couvert, dont la hauteur sous plafond est supérieure à 1,80 m, calculée à partir du nu intérieur (mesuré à partir des plinthes). Elle s'obtient après déduction notamment des surfaces de plancher des combles non aménageables pour l'habitation ou pour des activités à caractère professionnel, artisanal, industriel ou commercial (par exemple, des combles avec un encombrement de la charpente important ou un plancher qui ne peut pas supporter des charges).

  • La situation serait en revanche totalement différente si les travaux envisagés devaient engendrer un changement de destination au sens de l’article R.151-27 du code de l’urbanisme (si par exemple il est envisagé de passer d’une destination bureau à une destination logement ou inversement) Dans une telle hypothèse, le simple changement de destination impliquera le dépôt d’une déclaration préalable. De plus, si ce changement de destination implique également une modification de l’aspect extérieur de l’immeuble (le simple agrandissement d’une fenêtre suffit) un permis de construire sera nécessaire. Pour toutes ces questions, nous te conseillons de télécharger la notice explicative pour les autorisations d’urbanisme qui peut être très utile (téléchargeable ici).

4) L’état du bien :

  • Dispose-t-il de fenêtres ? Si tu envisages d’y réaliser des logements, cela pourrait être extrêmement impactant, d’autant plus si tu veux faire des logements de standing ;

  • Comment prévois-tu de te raccorder aux différents réseaux (eau, électricité, …) ;

  • Quel est son état qualitatif et sanitaire ? Les diagnostics à réaliser sur un immeuble existant à réhabiliter sont beaucoup plus nombreux que ceux à réaliser sur un foncier vierge de toute construction. Il faudra que tu obtiennes des informations, en fonction de la date de construction de l’immeuble, sur l’amiante, le plomb, la mérule, etc.

[Antoine] : La quoi ?

[UnMute] : La mérule est un champignon qui s’attaque aux boiseries dans les bâtiments présentant un excès d’humidité. Elle peut être dévastatrice si sa présence, qui n’est pas aisée à détecter, n’est pas identifiée à temps. Ça peut donner des choses comme ça :

[Antoine] : On dirait presque le grenier des Weasley 😉

Il faudra aussi que tu vérifies la structure. Les planchers peuvent-ils supporter les charges que tu vas leur apporter ? quel est l’état du toit de la copropriété dans la mesure où tes appartements seront directement dessous.

5) La réglementation applicable aux biens que tu envisages de réaliser, en fonction de leurs usages futurs :

Si tu envisages de louer et non de vendre une partie des logements, il faut savoir qu’un propriétaire doit fournir au locataire un logement décent. Cette notion implique la réunion de 5 critères : une surface minimale, l'absence de risque pour la sécurité et la santé du locataire, l'absence d'animaux nuisibles et de parasites, une performance énergétique minimale, la mise à disposition de certains équipements. Si le logement n'est pas décent, le locataire dispose de recours. Notamment, un logement proposé à la location doit avoir une surface minimum. A ce titre, un logement doit comporter au moins une pièce principale ayant :

  • Soit une surface habitable d'au moins 9 m² et une hauteur sous plafond d'au moins 2,20 m ;

  • Soit un volume habitable dont la hauteur est inférieure à 1,80 mètre, d'au moins 20 m³.

6) Le prix d’achat des lots de copropriété :

  • Tu dois enfin définir le prix en tenant compte des prix de sortie de ton opération et du coût prévisionnel des travaux que tu devras réaliser mais ce prix ne doit pas non plus dissuader les copropriétaires ;

  • Généralement, le prix devra tenir compte du prix au m² pratiqué dans le quartier, de la situation de l’immeuble, de l’état du bien, etc.

[UnMute] : Voilà, je pense que l’on a fait un bon tour d’horizon et que tu es désormais prêt à te lancer.